Portraits de l'écrivain en publicitaire

En mariant les noms de Chéret ou de Mucha au papier à cigarette Job, ceux de Cassandre ou Savignac au « Dubo/Dubon/Dubonnet » et à la vache Monsavon, l’affiche a imprimé dans l’imaginaire collectif la mémoire de la publicité artistique. Mais qui se souvient que Victor Hugo associa sa signature à l’Encre Triple noire (pourtant réputée indélébile), que Raoul Ponchon, dans Le Courrier français, abonna sa plume aux Pastilles Géraudel, que Simca est redevable à Françoise Sagan de son « Entrez dans l’Aronde », que Cocteau posa dans Paris-Match pour les téléviseurs Ribet-Desjardins ? De grands noms des belles-lettres comme Paul Valéry, Blaise Cendrars, Jean Giono ou Raymond Queneau, ont signé des textes publicitaires – de très beaux textes. Un tenace destin d’oubli, symptomatique du scandale que constitue le mélange de la littérature pure, gratuite, avec la « littérature » intéressée et appliquée, pèse sur les innombrables contributions des écrivains à la publicité depuis le XIXe siècle. Ce volume s’emploie à redessiner l’un des visages les plus méconnus de l’écrivain et à éclairer une zone d’ombre de la « condition littéraire ». On y découvrira une galerie de portraits insolites, un album de famille improbable et pourtant bien réel, où se trouvent réunis pour la première fois, sous la commune bannière de l’activité publicitaire, des auteurs apparemment aussi peu apparentés que Zola et les Gautier, Sacha Guitry et Léon-Paul Fargue, Paul Reboux et Robert Desnos. On y trouvera des informations sur les motivations très diverses qui ont suscité et suscitent encore aujourd’hui de telles collaborations avec les marques, la manière dont les écrivains ont vécu et « géré » le grand écart entre les exigences de l’œuvre et celles de la promotion marchande, le rôle joué par la publicité dans l’économie de la carrière littéraire. Entretien inédit avec David Foenkinos. Ce numéro est dirigé par les responsables du programme ANR « LITTéPUB »

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